Extrait venu de Limbes lointaires
Hey! Un tit article différent de d'habitude puisque je vous propose aujourd'hui un écrit personnel, un extrait tout du moins: critiques, positives ou pas (justifiées plize!) tout est admis en commentaire!
Prologue
Les rochers ruissellent de sang sous mon dos déchiré. Clapotis des vagues près de mon corps recroquevillé. Le vent apporte avec lui de maigres volutes de brume sombre et empoigne en échange quelques plumes noires. Ma main en tient également une poignée. J’ai dû les lui arracher pendant la chute. Cette pensée me fait sourire. La mort s’approche, mais je reste sereine. Devant mes yeux, esquissée sous le voile de sang qui recouvre ma vision, une silhouette humaine. Ou peut-être plusieurs, je l’ignore. Elles ne crient pas, ne s’approchent pas, ne me touchent pas. Ce ne sont pas eux.
Elles demeurent immobiles, me fixent et semblent attendre comme moi.
Attendre le début de l’histoire. Elles stagnent à la lisière du néant. Proches et lointaines. Vivantes et inexistantes. Floues.
Ne pas rester seule finit de me rassurer. Je ne discerne plus ni douleur ni remords.
Le temps se ralentit. Les ombres semblent s’approcher de quelques pas. Plus près, venez plus près je vais pas crier. J’aurais préféré que vous arriviez plus tôt mais remâcher ce qui s’est passé ne servirait à rien, ce qui importe c’est que vous soyez là. Être ou ne pas être, qui sait si vous n'existez pas que dans ma tête… Et qui reste-t-il pour s’en préoccuper ?
On pourrait attendre, simplement attendre, en se regardant en chien de faïence, vous à me contempler crever lentement et moi…Moi à ne rien faire. Je pourrais aussi pleurer, vous supplier de me sauver, vous pourriez écouter votre sens civique et me porter secours. Ce serait probablement suivre la base des instincts de survie et de compassion… Mais non. On n’a plus le temps pour les réflexes logiques. Il existe des choses plus importantes…Plus importantes que d’essayer de me sauver.
Asseyez-vous. Ou assieds-toi. Je ne distingue plus le nombre de personnes qui se tiennent devant moi. Une, dix ? Ou peut-être zéro ?
Asseyez-vous ai-je dit, je vais pas vous bouffer! J’ai pas la force de me lever, alors vous faire du mal… J’vais plutôt vous raconter une histoire. Mon histoire. Un peu égoïste pour une personne lambda et en bonne santé, mais plus acceptable pour une mourante. Une mourante qui sait certaines choses qui doivent être racontées…
Mais qui suis-je vous demandez-vous? Une fille, une mortelle, une adolescente ? Raté. Mon nom est Elysandre, et je ne suis pas humaine.
J’imagine vos yeux se plisser de confusion. C’est pas le genre de déclaration que l’on gobe directement, et pourtant. Oui je possède l’allure générale d’une terrienne, j’ai deux bras, deux jambes, une tête et deux yeux mais mes iris sont violets, et c’est ça qui fait ma différence.
Là, vous devez me scruter plus attentivement et peut-être grimacez-vous. C’est pas joli-joli tout ça. Sans être capable de me voir ou de remuer le petit doigt, je devine que je suis dans un sale état. Une chute pareille ne laisse pas indemne, j’en ai été témoin, sans compter que je suis tombée de plus haut qu’elle. La morsure du sel et l’humidité poisseuse qui me recouvre me permettent d’évaluer les dégâts. Ma robe, ma cape et mes cheveux, imbibés de sang probablement, me collent à la peau. Mes pieds nus, voilés d’une épaisse couche de poussière, trempe dans une flaque d’eau de mer vraisemblablement vermeille. Une bonne partie de mes os s’est brisée. Je frissonne. Il fait froid dans cette contrée, sans compter le vent ou l’humidité des rochers. Je suis recroquevillée dans l’ombre du Manoir qui s’étend à cette heure-ci jusque loin dans la mer, allant frôler l’île la plus proche.
Mes yeux papillonnent. Dans la pénombre de la nuit, ils présentent toujours une couleur claire et un peu délavée. Non, ni mauve ni carmin; par tradition on les traite de pourpre.
Vous vous fatiguez de ce monologue. J’ignore si vous y comprenez quelque chose…Il y a tant à dire…
Il me reste cent mois à raconter, et bien moins à vivre, alors trêve de bavardages. Tenez-vous bien. C’est long, c’est compliqué, c’est singulier sans compter que ça risque de bousculer certaines de vos idées.
Et laissez-vous emporter...